La société créée de fait, essai de théorisation

Reconstitution rétrospective d'une situation passée dans laquelle des individus se sont comportés comme des associés « sans en avoir conscience », la société créée de fait balance entre le monde du fait et celui du droit. À la demande d'une des parties ou d'un tiers, les juges procèdent à une qualification sociale a posteriori afin de faire bénéficier le demandeur des conséquences financières de la liquidation ou de la responsabilité solidaire des membres de la prétendue société. Instrument subsidiaire de rééquilibrage des patrimoines, la qualification sociale permet, ainsi, l'application d'un jugement en opportunité dans lequel les juges se livrent à une appréciation souvent inadéquate de la caractérisation des éléments constitutifs de la société.

Dans le silence de la loi et la perplexité de la doctrine, la société créée de fait se présente comme un phénomène social laissé à l'usage de la jurisprudence. Mais l'abondant contentieux dont elle est nourrie ne saurait masquer les incertitudes qui caractérisent la véritable nature juridique de la notion.

Comment une société peut-elle être créée de fait et non de droit ? Comment admettre l'émergence inconsciente d'un lien social en dehors de toute volonté de ses membres ? Comment expliquer que la liquidation soit la suite systématique que les tribunaux réservent au constat de l'existence d'une société créée de fait ?

Autant d'interrogations qui creusent davantage le vide juridique dans lequel la notion s'est engouffrée.

C'est cette quête passionnante que l'auteur s'est proposé de mener, en tentant d'apporter des réponses au flot de réflexions incontournables que suscite l'analyse de la société créée de fait afin de tendre vers une théorisation du phénomène. Déterminer sa nature juridique afin d'en induire une définition propre et un régime juridique cohérent, telle fut l'ambition de ces travaux de recherche.